Lauranne

Poésie

J'aurais pu...


J'aurais pu vous dire qu'il portait la bonté sur son front
Que j'aimais ses mains fermes et tendres
Que son coeur était comme un feu sous la pluie
Vers quoi je courais
Mais il n'était pas de ceux-là.

J'aurais pu me le revoir simple et droit
Fort d'avoir tant travaillé la terre de sa ferme
La peau burinée de mille passés
Un pont de pierres sèches
Mais il n'était pas de ceux-là.
Peut-être alors aurais-je pu vous le conter fier
Patriarche lourd de son histoire
Grand chêne aux branches innombrables
Le refuge ultime sous l'orage
Mais ce serait mentir
Car il n'était pas de ceux-là.

Alors dire que ses yeux brillaient
de
Toute la sagesse du monde
Que nulle question ne trouvait ses lèvres closes
Une source au murmure toujours renouvelé
Un ruisseau jamais tari
Je me trahirais
Si je disais celà.

Peut-être me faut-il juste accepter
Sans l'écorcher sans le bénir
Sans l'abîmer
Qu'il était de ceux dont on ne dit rien
Qu'il était juste de ceux-là
Présents invisibles du passé
Mon pépé.


Que dire...

Il est des images bénies par des mains lasses
Des icônes vaines qui dénudent les murs
Vides offerts aux passants qui s'enlassent
Bouches ouvertes comme un sexe trop mûr

Il est des livres sous les regards qui se couchent
Des poèmes nus aux encres indélébiles
Amants inutiles dont les pattes de mouche
Grimpent vers l'immaculé béant des stabiles

Il est aussi des sons à la mutité d'airain
Des cuivres vibrant de silences éperdus
Fesses tendues sous la cambrure des reins
Qui résonnent parfois du vide répandu

Comme il est des statues à l'ossature de verre
Qu'un peu de nudité fait paraître fragiles
Et se lèvent sans émoi sur des ciels couverts
Transparentes au regard de tous les vigiles

Comme il est des silences qui crient
Des faces muettes qui hurlent
Des visions qui griffent
Et des paysages immobiles qui se débattent.


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