CORRIB
in
La porte de proie
à Philippe Mahoux
le vrai couteau
cherche la fente
la bouche sans voix
du mur des regards
dans les pas lents
des passants pâles
frôle la houle
jusqu'au pal
vraie page fendue
au couteau mental
l'appel du rien
sonne au matin
dans le glas
des mouettes
rêves blancs
sous l'appeau d'angoisse
l'instant grave
sur les mains
un chemin froid
vagues après vagues
le cur gronde
au profond d'une bouche
ainsi marcher
au bout des mots
faire bruit
ou taire
jusqu'à vomir
l'os de langue
pierre levée
houle contre énigme
la nuit a laissé dans la tourbe
bêtes et mensonges
jusqu'à l'enfouissement
des charniers solaires
rages ? cris - corps
vains sur la page
sans personne
rue la chair du Corrib
rugissantes frayeurs
d'enfances assourdies
fraie un clair effroi
ainsi aller
au bord des mots
dans le corps
de la truie
dans la combe
crue
jusqu'au cul
du lac
en mordant quelque chose
comme sa détresse
Galway,
26 mars 1998.
***
quelqu'un me cherche
fissure d'autre chose
qui bouge sur le seuil
une ombre de bouche
dans la pensée froide
le centre violent
de la chose parfaite
la bête stupéfiée
dans la combe cave
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***
Le fond de l'air est si clair que la douleur s'est noyée
à la rivière
Le chemin balise un reste d'oiseau
Nous avons vu glisser un pan de ciel dans le bois
Une voix haletante et fragile s'est couchée
Jusqu'au miracle dans l'herbe incendiée
Face au soleil je meurs de la solitude des souvenirs
On voudrait bien qu'il y ait une issue
Une clef fraîche posée sur la table
Pour ouvrir le coffre de la pendule
Où grondent les secrets chancelants
***
Le silence charbonne entre le lit et le pré
II y a un chant d'abîme dans les draps
Qui défonce le roncier
Soudain la bêche rebondit
Les yeux touchent la poussière d'un visage
Et le couteau des feuillages étincelle
Le dormeur récure un fond d'âme au soleil des morts
Au loin on entend passer le tracteur de nuages
Avec ses nuds coulants qui jappent au-delà de l'homme
Puis on entend ses propres pas comme
Une buée de sang sur la route déserte
Lentement la pierre s'est enfoncée dans l'eau noire des
nerfs
Caminel,
27mai 1999
.
***
Solitude
C'est la trappe retombée la mort en lacets
La nuit égorgée dans la tranchée des remords
C'est l'attrape-mort qui gronde et hurle et mord
Cest le lit halluciné où tout a commencé
Le poème assiégé par des maléfices
bas
Qui tourne à l'homicide sans livrer combat
C'est la lie épaisse d'une insomnie cuvée
La brume de la peur la chair dépossédée
La belle épée du martyre d'être né
Caminel,
le 27 mai 1999.
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