Jean Pierre Pouzol

Le Cousu


ô lèvres murées - bords des chants -
monte la lumière dans la pierraille
et le feu des roses - comme un cri
indomptable en dedans - avec
ce regard blanc - qui coule -
maçonné dans le sang -
comme l'étoile verte sous la peau -
tu es l'arbre dans la rosée des vans - celui
sur qui le vide appuie
son échelle transparente -

cousu à la foudre
tu descends dans la ténèbre -
et révulsé -
tu n'as plus que la peau de tes regards
tu partages tes bras -
tu plonges à rompre -
retenu par des griffes -
cousu au tambour d'abîme -
cousu à la mort -
tu avances dans le pré -

ô douleur - et avili dans la vacance
l'anti-toi - comme
la voix de l'âme prise
dans les fers -
tu n'es plus un visage -
plus un corps -
te voici sans parole -
te voici l'inexistant -
la trace s'est mangée -
là -
où ne demeure qu'un coup
de foudre -
dans le vide

ainsi séparés - que commence -
l'intolérable -
l'horreur ?
rejetés dans la poussière des lumières -
nous avons partagé l'éclaircie
pendus comme un oiseau au linteau de l'orage -
et le tourment nous quitte -
nous sommes -
comme une goutte d'eau dans les braises glacées -
ainsi tu cueillais - vers le bas -
ce qui brille dans la pensée

que s'accomplisse le soudain -
lorsque revêtue paraît l'affranchie -
ah que te saisissent les choses de l'enfance-
toujours les mêmes
reviennent -
et demeurent seules
au-dessus d'un lac blanc -
à s'ébattre -

ainsi tu vins - toute parole fut étrangère -
comme dans toi un bloc étouffant -
jusqu'à cette descente dans les poussières
où les miroirs sont des lèvres -
jusqu'à ce vide - merveilleux écorché
qui gifle l'abîme de ses traces -
ainsi tu écris - tu souffres - et tu suffoques -
et dans ta chute - tu meurs -

Caminel, samedi 10 novembre 2001.


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