Jean Pierre Pouzol

 

à Lauranne

Je cède
à l'effroi
à la montée des eaux ouvertes
qui tapent
contre le flanc

je cède
à la voix
qui lape
dans la maison retournée

je cède
à la houle
qui troue
l'escalier du gouffre

à la table
qui ferme
comme un couteau de nuit

à la porte
qui éclate
aux chants des papillons

je cède
à la cendre
à la suie
à la luisante truie d'angoisse

je cède
pour rien
pour les pas défaits de tout
de moi
qui tape
sur la trappe des trous
enfoncée
au gong de la gorge

je cède
pour rien
par faiblesse
à la luisante de l'angoisse

je remue des peaux
qui sont des gouffres
dans le cœur croué

je cède
par raison
par faiblesse
le mors cloué
à la houle des arches

je cède
à la frondaison des roues
qui arrache
chaque marche
qui entame
au saignant
de la bouche
chaque parole

je troue
chaque visage
avec sa viande
collé sur le papier-peint du vide indéracinable

je cède
par raison destructrice
par force déraisonnante
par fatigue
pour rien

je cède à la rive lasse
derrière la cloison polaire
du soleil face
au portail bouillonnant

je cède
à l'infranchissable
à l'assaillement
à la craie du sang et de l'herbe
par faiblesse
pour rien

Atlantic City, 8 & 9 septembre 2001.
Poèmes oraux in La porte de proie.


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